Life Is Strange [Vaël]

J'avais passé ma journée à cuisiner pour le mage noir. Une petite heure avant le coucher du soleil, j'avais pris une douche rapide et était allé me changer, enfilant des vêtements classe mais pas trop non plus, voulant avoir l'air un peu décontracté, en gros tout l'inverse que ce que j'étais en réalité.
Je ne pouvais pas être plus stressé. J'avais eu peu de rater mes plats et je n'étais pas détendu du tout. Pourtant quand il frappa à la porte, j'étais prêt, et le repas aussi. Je lui ouvris la porte et retint ma respiration quelques secondes en le découvrant si beau.

- Tu es pile à l'heure.

Je l'invita à entrer et le laissa prendre ses aises avant de lui proposer quelque chose à boire.

Il avait remarqué que je n'allais pas bien. Je repris une contenance, m'insultant intérieurement d'avoir laissé voir que j'étais un peu stressé.

- Non rien de grave, j'ai juste failli brûler le repas tout à l'heure...

C'était stupide de stresser juste pour ça. Je lui fis un bref sourire contrit avant de boire une gorgée d'un vieux whisky que j'avais depuis quelques décennies.

Un silence un peu gênant s'était installé et je ne savais pas trop comment le rompre. Je termina mon verre cul sec et me racla la gorge.

- Hm. Et bien, que dirais tu de passer à table?

J'avais dressé une belle table, et une bouteille de vin décantait sur la table. Je lui servit des escargots à la française en entrée, suivie d'un rôti de biche et d'un gratin dauphinois, sans oublier les châtaignes et les champignons des bois cuisinés à part. Pour le dessert, j'avais prévu un crumble aux baies sauvages.
Tout avait été réussi à la perfection, malgré mes inquiétudes sur le rôti qui s'avéra parfait.

Je lui souris, le vin avait vite détendu l'atmosphère et nous conversions maintenant avec la plus grande facilité.

- Je n'ai pas vraiment de mérite, les matières premières sont à ma disposition dans les bois, et j'ai un peu plus d'expérience...

L'immortalité permettait entre autre de vivre plusieurs vies à plein d'endroits différents. Pendant un temps, j'avais été cuisiner pour la cours de sa Majesté en Angleterre, ce qui m'avait appris pas mal de façon de cuisiner le gibier par exemple.

Sa réponse me surprit. Tous les jours? Pour cela il faudrait que l'on soit ensemble lui et moi... je lui jeta un regard dubitatif avant de boire mon digestif à mon tour.

- En attendant, ce n'est pas tous les jours alors tu peux en profiter autant que tu le souhaites. Si tu me préviens au moins deux jours avant, je peux te cuisiner tout ce que tu veux.

Je l'invita à venir s'asseoir près de moi sur mon lit, vu que je n'avais pas de canapé.

- Dis, tu veux tester un truc sympa? Ça te dirais de visiter mes souvenirs?

Il était sceptique, je comprenais pourquoi. C'était quelque chose que les vampires faisaient souvent entre eux, pour communiquer sans aucun mot. Mais avec un mortel c'était plus complexe, mais au moins je pouvais un minimum contrôler ce qu'il verrait.

- Je propose de voir mon passé de tes propres yeux, vivre une partie de mes souvenirs. Je te laisse choisir l'époque.

Je pris un canif sur la table de chevet et nettoya la lame.

- Tu vas devoir goûter à mon sang, si ça ne te fait pas peur...

Je m'entailla les veines du poignet et le lui tendit pour qu'il puisse boire mon sang. Il y alla d'abord timidement, puis un peu plus franchement. Je décida de lui montrer la fin de ma vie de mortel, ma renaissance et l'époque Victorienne, mes premiers pas dans un monde en pleine évolution, mes premières chasses et mes premiers échecs. Mais je n'avais pas prévu de lui montrer Anna. Les souvenirs de la jeune femmes reparurent en même temps que le flot importants d'images et de sensations. Ma vie à ses côtés, sa soudaine maladie, mon incapacité à la sauver, ni même à la transformer, puis la douleur, les décennies de souffrance suite à sa perte. Je lui retira soudainement mon poignet, une larme de sang coulait sur ma joue. Je n'avais pas voulu lui monter cela.

J'essuya vivement le sang sur mon visage, chamboulé par des souvenirs que je pensais enfouis pour toujours. La douleur me vrillait de l'intérieur. Incapable de garder une contenance, j'étais anéanti par ce que je venais de revivre.

- Ce n'est...rien. Tu ne pouvais pas savoir...

D'un geste nonchalant de la main, j'éteignis les lumières dans la pièce, il ne faisait pas aussi noir que dans les catacombes, mais la forêt bloquait une bonne partie des rayons de la lune. Je laissa Killian me retirer mes vêtements et me mettre au lit sans rien dire.

- Tu n'aurais pas dû voir cela. Je suis désolé...

J'enfouis mon visage dans son cou, inspirant son odeur avec délice, chassant mes idées noires peu à peu.

- Il n'y a rien dire, je pense que tu as déjà tout vu et ressenti. Tu comprends aussi pourquoi je ne souhaite plus m'engager dans une relation de couple...

Je l'embrassa dans le cou tendrement.

- Même si quand je suis avec toi ça me donne envie d'essayer à nouveau.

Je ne répondis rien pendant un petit moment avant de lui dire calmement.

- Je ne voulais pas dire maintenant. Mais juste que si je dois choisir quelqu'un pour retenter l'aventure, ce serai toi.

Je l'embrassa tendrement.

- Et maintenant, que dirais-tu de t'envoyer en l'air avec moi assez de fois pour me faire oublier que j'ai été déprimé ne serait-ce qu'une fois dans ma vie.

Cet homme savait parfaitement ce que "changer les idées" voulait dire. Il s'occupa tellement bien de moi que le moment de déprime un peu plus tôt avait été totalement effacé. J'étais allongé sur le dos, essoufflé et le sang de Killian un peu partout sur moi.

- Je n'en reviens toujours pas que tu aimes autant qu'on te fasse du mal au lit.

Il n'arrêtait pas de me demander de le mordre et de lui faire mal. Il titillait mon côté prédateur jusqu'à ses limites.